Le foot et la politique sont des sports collectifs!

Publié le par Cécile Sow

Dakar, novembre 2022. Tandis que la fraîcheur peine à chasser la chaleur moite de l'hivernage et que les rares espaces verts (ayant survécu à la boulimie foncière et la folie immobilière des hommes) fanent à vue d'œil, la ville se pare de ses beaux atours. A quelques jours du coup d'envoi de la Coupe du monde de football, le vert, le jaune et le rouge, du drapeau national, lui redonnent de la couleur. Elle n'est pas plus belle, mais elle est plus gaie. Il y a des étoiles jusque dans les yeux des Sénégalais. Même ceux qui ne sont pas passionnés de foot se laissent gagner par l'euphorie du Mondial. Il faut dire que cette année, la compétition a du cachet. Les Lions de la Teranga arrivent sans doute la tête plus haute que par le passé, mais avec un drôle de fardeau entre les mains: le trophée continental, longtemps convoité et enfin remporté en 2022. Nul ne peut oublier le bonheur des gens, sortis par milliers, pour fêter le sacre, puis accueillir leurs héros. Un peuple galvanisé par des buts et uni par la foi... en son équipe. Le dimanche 6 février, la fierté nationale s'affiche soudain sans retenue et sans distinction. Il aura fallu 120 minutes de jeu et une séance de tirs au but pour donner un souffle nouveau à notre devise, devenue, au fil des ans, un banal ornement sous les armoiries du Sénégal.

Les Lions de la Teranga n'ont pas encore joué leur première rencontre, néanmoins, ils déclenchent des échanges passionnés. Pendant que les uns rêvent d'une victoire au Qatar, les autres, moins ambitieux ou plus lucides, visent le quart de finale. Même les "indifférents" nourrissent au fond d'eux l'espoir de petites et grandes victoires. Hormis le football, je me demande s'il y a, au Sénégal, un évènement suscitant une telle effervescence avec la nation en son cœur. Tant qu'il y a des matchs, il y a des drapeaux. Partout, nos couleurs s'affichent. Cette fierté nationale est belle à voir. Toutefois, elle est éphémère et artificielle. Très vite les réalités du quotidien viendront de nouveau noyer les joies et les espoirs de nombreux Sénégalais. Plus le temps passe, plus j'ai l'impression que nous sommes devenus un peuple fâché. Tellement fâché que notre fierté nationale a été diluée dans une mer d'amertume et de rancœur. Ce que le football a le pouvoir de faire remonter à la surface, j'aimerais être capable de dire comment nous pourrions le maintenir hors de l'eau. Évidemment, je ne parle pas de cette fierté flirtant avec l'orgueil et l'arrogance, mais de celle qui pousse à l'introspection, au dépassement de soi et à la magnanimité. Cette fierté-là serait d'une grande utilité pour notre pays.

En tant que profane, lors d'une rencontre, ce que je vois, avant tout, c'est une équipe: celle du Sénégal. Onze joueurs qui se démènent sur la pelouse; une douzaine d'autres qui frémissent, gémissent, rugissent depuis le banc de touche; un sélectionneur et tout l'encadrement qui portent, sur leurs larges épaules, les attentes d'un peuple et de ses dirigeants. Sur le terrain, les Lions communiquent et se font des passes; ils se défendent et attaquent; ils marquent des buts et évitent d'en encaisser. En principe, tout se déroule dans le respect des règles et les membres d'une même équipe agissent dans l'intérêt du groupe. Par conséquent, même s'ils ne s'appréciaient guère ou étaient en désaccord total, ils ne seraient pas censés s'invectiver, s'injurier, se taper dessus. Une victoire se remporte dans la cohésion et le respect.

Gouverner ou s'opposer sont aussi des sports collectifs. Pour réussir, il faut une vision ainsi que des ressources humaines, matérielles et financières adéquates. On y ajoute la probité, la solidarité, la sincérité... et le tour est presque joué. Sans oublier la patience et l'endurance. Imaginons que le Sénégal soit un terrain de football. Avec des équipes fairplay, conscientes de leurs forces et de leurs faiblesses, nous assisterions à de superbes matchs. Il n'est jamais trop tard pour bien faire...

Bon Mondial 2022 à toutes et à tous.

Que le meilleur gagne!

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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